« Contre-nature » : différence entre les versions

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(1) qui est celle d'Ernst Mayr. En fait, Ernst Mayr a donné successivement deux définitions du concept d'espèce biologique. En 1942 : "groupes de populations naturelles, effectivement ou potentiellement interféconds, qui sont génétiquement isolés d'autres groupes similaires"; puis, en 1963 : "communauté reproductive de populations, reproductivement isolée d'autres communautés, et qui occupent une niche particulière dans la nature".
(1) qui est celle d'Ernst Mayr. En fait, Ernst Mayr a donné successivement deux définitions du concept d'espèce biologique. En 1942 : "groupes de populations naturelles, effectivement ou potentiellement interféconds, qui sont génétiquement isolés d'autres groupes similaires"; puis, en 1963 : "communauté reproductive de populations, reproductivement isolée d'autres communautés, et qui occupent une niche particulière dans la nature".


 
==Voir également==
* [[Philo et zoo]]


[[Catégorie: philosophie]]
[[Catégorie: philosophie]]

Version du 14 août 2008 à 16:58

L'argument le plus employé pour justifier l'opprobre à l'égard de la zoophilie est qu'elle serait contre-nature. Cette notion n'est pas sans poser problème du point de vue philosophique. Sous l'apparente simplicité et l'évidence de l'affirmation que la zoophilie serait contre nature, se cache en fait un argumentaire structuré qui n'est pas dépourvu d'incohérences.


Si nous nous plaçons dans une perspective kantienne, comme l'a souligné hadrien, la zoophilie peut être une pratique indifférente. Même s'il faut s'empresser de souligner que Kant lui-même y aurait vu une abomination commise contre la nature humaine ! En effet, une telle pratique qui, en les faisant s'accoupler, met l'homme au même rang que la bête, contrevient pour lui au devoir que l'homme a vis-à-vis de lui-même, au même titre que la fornication, l'ivrognerie et la gourmandise !

Si nous nous plaçons dans une perspective utilitariste, où le critère du bien et du mal est la quantité de plaisir ou de souffrance que nous occasionnons chez un ou plusieurs êtres qui en sont capables ; alors la zoophilie, pour autant qu'elle procure du plaisir à l'animal et à l'homme, est tout à fait défendable. En tant qu'elle fournit du plaisir, elle doit être aussi défendable qu'est condamnable toute souffrance infligée aux animaux. Elle en est l'exact contraire. L'antispécisme est donc une version cohérente (peut-être la plus cohérente) de l'utilitarisme : il suffit de voir ce que des théoriciens fameux de l'antispécisme utilitariste comme Peter Singer pensent de la zoophilie.

Si nous nous plaçons dans la perspective d'une éthique de la nature, pareil accouplement semble contrevenir à ses lois éternelles. Dès lors, la zoophilie paraît condamnable.


1° Les êtres vivants ne seraient poussés à l'acte sexuel que dans l'unique perspective de la reproduction ;

2° Or, une union entre individus d'espèces différentes est inféconde;

3° Donc, la nature ne saurait commander l'union de deux individus d'espèces différentes.

4° Or, la zoophilie, ou union d'un homme et d'un animal, est un cas d'union interspécifique;

5° Donc, la zoophilie est contraire à la nature et à ses lois.


On voit que le raisonnement est en réalité complexe et passe par toute une série de médiations. Sans même récuser le principe d'une éthique de la nature, deux propositions intermédiaires de ce raisonnement peuvent être récusées.

Le passage du 2° au 3° peut être récusé de la manière suivante: S'il est vrai qu'il entre dans la définition de l'espèce biologique reçue habituellement (1) qu'elle regroupe des individus dont l'union est féconde (interfécondité) et dont l'union avec des individus d'autres groupes n'est pas féconde (isolement reproductif), la nature n'est pas avare de contre-exemples d'hybrides néanmoins sexués. L'union d'une lionne et d'un tigre a pour fruit le tigron, dont le mâle est stérile, mais la femelle, potentiellement féconde. L'union de l'âne et de la jument (ou de l'ânesse et du cheval) a pour fruit la mule ou le mulet, qui sont sexués bien que stériles. Or, ces animaux, en tant que sexués, ont des "chaleurs" ; même si, en tant qu'inféconds, ils sont stériles. Ce que commande la nature n'est donc pas si clair ! Elle semble leur commander de se reproduire sans leur en donner le moyen : sexualité et reproduction se distinguent dans la nature.

Cela nous amène à contester la 1° proposition. On sait que, parfois, les animaux ont des pratiques homosexuelles : les lions, les bonobos, etc. Leur sexualité déborde donc le but de reproduction, sans qu'il y ait pour cela rien de contraire aux lois de la nature, auxquelles la nature animale, par définition, ne saurait échapper. Et quand même on penserait qu'il est contraire à ses lois qu'un animal en montât un autre d'espèce différente, on ne ferait par là que se leurrer : j'ai vu, de mes yeux vu, par deux fois chez un ami un chien monter un chat. Ils semblaient l'un et l'autre trouver leur plaisir à cette union doublement suspecte, pour une éthique classique de la nature : homosexuelle, et interspécifique.

Ainsi donc, la condamnation de la zoophilie qu'une éthique de la nature peut fournir semble assez fragile. C'est pourtant celle qui est le plus communément invoquée. Néanmoins, ce n'est peut-être pas en ce sens que Richard Von Krafft-Ebing, qui le premier répertoria les pratiques sexuelles que nous dirions aujourd'hui "déviantes" dans sa Psychopathia sexualis (1886) range la zoophilie dans les pratiques contre-nature.


En effet, une autre interprétation du terme "contre-nature" est toujours possible, non en référence à la nature des naturalistes, mais à celle de l'homme. C'est ainsi que Kant entendrait que la zoophilie est une pratique contre-nature, au même titre que l'ivrognerie, la gourmandise, et la fornication. Une pratique zoophile nierait l'humanité en l'homme qui l'exercerait, et à deux titres :


1° comme toute fornication;

2° comme fornication avec un animal.


Une discussion du kantisme sur ce point fournirait une base pour réfléchir à la question de savoir si l'humanisme permet ou non un tel rapport à la bête. Cela permet de distinguer deux options humanistes différentes, également possibles, et non-contradictoires dans une certaine mesure :


1° l'éthique est affaire humaine : hors l'humanité, tout est éthiquement indifférent;

2° l'humanité est l'affaire de l'éthique, et plus l'homme se rapproche de la bête, plus il s'éloigne de lui-même en même temps qu'il s'éloigne de l'éthique.


On voit bien par là que deux types de rapports humanistes aux animaux sont possibles :


1° l'indifférence;

2° le dégoût.


C'est dans cette mesure qu'une contradiction apparaît entre les deux options humanistes, en même temps qu'apparaît la question : "comment se conduire vis-à-vis des animaux ?". La pratique zoophile a au moins le mérite de mettre en lumière cette question, avec une acuité toute particulière.


Texte tiré et adapté d'un post de Gaiffelet sur le forum antisceptique, http://dogmatique.kanak.fr/forum.htm

La suite sur: http://dogmatique.kanak.fr/le-forum-anti-sceptique-le-retour-f2/de-l-art-et-du-cheval-t45.htm

(1) qui est celle d'Ernst Mayr. En fait, Ernst Mayr a donné successivement deux définitions du concept d'espèce biologique. En 1942 : "groupes de populations naturelles, effectivement ou potentiellement interféconds, qui sont génétiquement isolés d'autres groupes similaires"; puis, en 1963 : "communauté reproductive de populations, reproductivement isolée d'autres communautés, et qui occupent une niche particulière dans la nature".

Voir également[modifier | modifier le wikicode]