Midas Dekkers

Louis XI (1423 - 1483), roi de France de 1461 à 1483.

La personnalité de Louis XI est relativement complexe et paradoxale, elle a fait l'objet de nombreuses considérations de la part des historiens. Ce roi est à la fois décrit comme courageux et couard, brutal et délicat, familier et distant avec une piété proche de la superstition. Il est aussi notamment connu par son physique disgracieux.

En liquidant définitivement la guerre de cent ans et en faisant avec l'aide des suisses, la conquête du duché de Bourgogne, il restaura le pouvoir royal et accentua la réalisation de l'Etat français. Ce fut un travailleur actif et méthodique, un diplomate habile et craint des seigneurs féodaux. Sa signature des années 1470 accuse un graphisme original et enlevé : LOYS (le u étant incorporé au y ).

Toutefois vers la cinquantaine, Louis XI présenta des troubles du comportement très marqués : suspicion envers son entourage, mesures arbitraires, isolement progressif (les animaux remplacent les humains : zoophilie ?), attitudes paranoïdes où se mêlent méfiance et orgueil, sclérose cérébrale puis thrombose qui provoquèrent une paralysie partielle et aboutirent à sa mort en 1483. Il avait 60 ans. (un âge très avancé pour l'époque où l'espérance de vie ne dépassait pas 40 ans).

Selon les médecins, Louis XI peut être considéré, à postériori, comme un artérioscléreux présentant les symptômes classiques de la maladie d'Alvarez, puis des thromboses cérébrales. Le personnage présentait des antécédents héréditaires chargés (Charles VII et Marie d'Anjou et surtout son grand-père Charles VI), qui pourraient expliquer, en partie, une dépression neuropsychique avec préoccupation hypocondriaques (son délire de la persécution pouvait prendre des formes sadiques avec notamment la fabrication de cages de fer pour les prisonniers). Son intelligence remarquable sur le plan politique, quoique dénuée de scrupules, son autorité inflexible, sa volonté de pouvoir et sa défiance soupçonneuse, sa cruauté notoire et sa mégalomanie constituent l'essentiel des ingrédients classiques du tyran ou du dictateur dont les nations sont parfois les victimes.


L'article suivant est tiré d'une page web présentant la biographie du roi Louis XI [1].
Elle met en exergue le fait que Louis XI aurait été zoophile.
Si quelqu'un peut trouver plus de détail sur ce roi ...


Louis XI, roi de France de 1461 à 1483, fut longtemps malmené par les chroniqueurs, les historiens et l’opinion publique. De son vivant ou au lendemain de sa mort, les partisans de son père, comme Thomas Basin, évêque de Lisieux, ceux de son grand adversaire le duc de Bourgogne, Charles le Téméraire, de ses ennemis, grands seigneurs humiliés tel son beau-fils le duc d’Orléans, le futur Louis XII, le dépeignent comme un tyran cruel et sans foi. Son conseiller Commynes ne corrige que partiellement ce portrait, car s’il reconnaît au roi de grandes qualités – le sens et sagesse et la vertu ou force d’âme – il ne cache pas les défauts du roi qu’il présente comme un personnage désacralisé, « un homme parmi d’autres, un roi dur dans un monde dur » (J. Dufournet) et qu’il dépeint selon le nouveau modèle des politiques italiens de l’époque : machiavélique avant Machiavel. Les philosophes du XVIIIe siècle voient en lui un symbole des dernières fumées de l’obscurantisme médiéval (Voltaire, Diderot) et, si les romantiques (Casimir Delavigne, Victor Hugo et surtout Walter Scott dans Quentin Durward ) lui reconnaissent du caractère, et même du génie, c’est un génie démoniaque. Louis XI est une incarnation du Méphistophélès de Goethe. Michelet marque un tournant dans l’historiographie de Louis XI. Certes, le roi reste un tyran « sans être pire que la plupart des rois de cette triste époque », mais il fut l’ennemi d’un mal plus grand que la tyrannie, la féodalité. Concession prudente, car le bilan du règne, pour Michelet, est largement négatif. Parce qu’il a réussi, Louis XI assoit « pour longtemps, l’admiration de la ruse et la religion du succès » et, finalement, il a servi la cause posthume de la féodalité : « La féodalité, ce vieux tyran caduc, gagna fort à mourir de la main d’un tyran. » Déjà perce chez Michelet l’idée de la modernité de Louis XI. C’est ce que les historiens et les écrivains ou cinéastes, depuis la fin du XIXe siècle, aiment à souligner. « Le roi Louis, c’est un homme tout moderne » (P. Champion). Louis XI a le sens de l’État, de la raison d’État. À la munificence et à la fréquentation des grands, il préfère la parcimonie, les petits moyens et les petites gens. Il comprend que l’économie fait la force principale des États et s’intéresse à l’« intendance ». Il croit que la fin justifie les moyens. Il a été, à sa manière, dans son style, un maillon essentiel de la chaîne historique qui a fait la France moderne. Enfin l’image violemment contrastée imposée par J. Huizinga dans Le Déclin du Moyen Âge (1919) a ramené Louis XI à la norme psychologique de son époque.

Un homme complexe

Dans l’opinion publique coexiste avec l’image nouvelle de ce roi moderne celle, traditionnelle, d’un prince, d’un homme cruel et presque névrosé : l’accusation d’avoir empoisonné son père Charles VII, les ennemis enfermés dans des cages de fer, ses « fillettes », l’accoutrement modeste d’un roi qui, entiché de ses « compères », tel son barbier Olivier le Dain, « Olivier le Mauvais » comme on l’appelle, hante les tavernes et les filles, la dévotion superstitieuse d’un souverain couvert de médailles, les machinations perpétuelles de cette « universelle araigne », selon le chroniqueur bourguignon Jean Molinet, en font un traître de mélodrame. À mi-chemin de la légende noire et de la légende dorée, Louis XI a dû être un homme complexe assez proche de celui qu’a dépeint Commynes : à la fois bon et haineux, dissimulé mais fin psychologue, méfiant mais lucide, sachant sacrifier l’accessoire à l’essentiel, encore que ce portrait soit quelque peu « rationalisé ». Enfin les contrastes, les bizarreries de son caractère et de son comportement ont pu être, autant qu’un trait d’époque et qu’un modèle littéraire du temps, la conséquence d’une nature pathologique : le docteur Bracher a soutenu que Louis XI était épileptique et a éclairé par là des aspects déconcertants de son caractère, sa zoophilie par exemple. Par-delà la psychologie individuelle, la recherche historique aujourd’hui s’intéresse surtout au règne, et Louis XI serait alors l’homme d’un moment (reprise de prospérité parmi les décombres de la crise économique, de la guerre de Cent Ans et de la Grande Peste, montée de la bourgeoisie, face à une noblesse et à une Église désemparées, apparition de nouveaux traits culturels en grande partie italiens parmi les survivances « médiévales ») plutôt qu’un tempérament individuel. Mais c’est l’époque où l’individu se détache de la masse et Louis XI, en bien comme en mal, a subi dans l’historiographie le contrecoup de cette mutation mentale.

Le dauphin en son Dauphiné

Fils du roi de Bourges et de Marie d’Anjou, né précisément à Bourges dans l’atmosphère sombre de 1423, Louis reçoit, comme tous les enfants nobles de l’époque, une double éducation fort sérieuse : intellectuelle avec Jean Majoris, maître ès arts, licencié en droit et théologien, ami du chancelier de l’université de Paris, Jean Gerson, qui trace le programme de l’éducation du prince ; sportive et militaire avec Guillaume d’Avaugour, bailli de Touraine. Marié, selon la coutume, très jeune, à treize ans, avec Marguerite, fille du roi d’Écosse, allié de son père contre les Anglais, il devient, à quinze ans, lieutenant général pour le Languedoc, et de ses expériences de jeunesse et d’enfance garde le souvenir concret des distances, des disparités qui s’opposent à la centralisation d’un royaume dont il n’a connu la capitale, à peine récupérée sur les Anglais, que lors d’un bref séjour en 1438. En 1440, suivant une habitude médiévale illustrée par les fils de Henri II d’Angleterre révoltés contre leur père au XIIe siècle et, en ce XVe siècle bientôt, par Charles de Bourgogne, dit le Téméraire, contre son père Philippe le Bon, Louis adhère à la révolte des grands seigneurs contre Charles VII et les Angevins tout-puissants à la cour. Le roi mate la Praguerie. Louis, après diverses missions politiques et militaires, et la mort de sa femme qui ne lui avait pas donné d’enfant et qu’il n’aimait pas (1445), est finalement exilé par son père dans son fief du Dauphiné (1447). Pendant dix ans, Louis administre soigneusement le Dauphiné et y fait son apprentissage de roi. « Ce dauphin en son Dauphiné, c’est déjà le roi Louis » (P. Champion). Il s’y remarie en épousant sans le consentement de son père, en 1451, à Chambéry, une enfant de douze ans, la fille du duc de Savoie, Charlotte. Par-delà ce mariage apparaît pour la première fois le mirage italien. Les intrigues du dauphin en France n’ont pas cessé. À deux reprises, Charles VII envoie des troupes menacer son fils. La seconde fois, Louis, pris de panique, va se mettre à Genappe, en Brabant, sous la protection du duc de Bourgogne, Philippe le Bon.

Le roi et l’affermissement de la monarchie

Roi par la mort de son père Charles VII, en 1461, aussitôt sacré à Reims, Louis prend rapidement ses distances avec le duc de Bourgogne, à qui il rachète les villes de la Somme (1463). Cependant, ayant aidé le roi d’Aragon à vaincre les Catalans révoltés, il garda le Roussillon et la Cerdagne qu’il s’était fait remettre comme gage (1462-1463). Une coalition seigneuriale, la ligue du Bien public, s’étant formée contre lui avec son frère Charles de France, il la démantela par des négociations après la bataille indécise de Montlhéry (1465). Pour désarmer l’hostilité du nouveau duc de Bourgogne, Charles le Téméraire, il le rencontra à Péronne en 1468, mais la nouvelle du soulèvement des Liégeois contre le duc, imputé au roi, conduisit Louis à l’humiliation et à de dures concessions. L’échec des opérations militaires de Charles le Téméraire (siège de Beauvais en 1472, qui donna plus tard naissance à la légende de Jeanne Hachette) ; la mort de Charles de France (1472) ; l’élimination des grands seigneurs hostiles, Armagnac, Alençon, Bourbon ; la signature avec les Anglais du traité de Picquigny qui confirmait leur renonciation à la couronne française (1475) ; les défaites par les Suisses et les Lorrains, puis la mort de Charles le Téméraire (1477) eurent pour conséquence l’affermissement de la monarchie française, débarrassée pratiquement pour toujours de la triple menace anglaise, bourguignonne, féodale. Des épisodes dramatiques, où le roi s’était révélé impitoyable, avaient marqué ces luttes. L’abaissement de la maison d’Armagnac s’était réalisé par l’assassinat du duc Jean V à Lectoure et l’emprisonnement de son fils Charles à la Bastille (1470) ; l’exécution du connétable de Saint-Pol en place de Grève avait scellé une éphémère réconciliation entre Louis et Charles le Téméraire (1475). Après la mort du Téméraire, Louis avait durement châtié les villes (destruction des murailles d’Arras en 1477 et exil en 1479 de tous les habitants de la ville rebaptisée Franchise) et les hommes (exécution du duc de Nemours) qui avaient soutenu le duc. La succession du Téméraire est un demi-échec. Au mépris des droits de Marie de Bourgogne, seule héritière du duc et sa propre filleule, Louis, quoique battu à Guinegatte (1479), s’empare de la Picardie, du Boulonnais, du duché de Bourgogne, de l’Artois et de la Franche-Comté, acquisition que lui confirme le traité d’Arras (1482), mais il ne peut empêcher le reste des Pays-Bas de passer aux mains de Philippe, fils de Marie et de son époux, Maximilien d’Autriche : les Habsbourg sont installés aux frontières les plus vulnérables du royaume. Cependant, Louis XI, qui avait constamment et efficacement joué, dans ses intrigues italiennes, contre les Angevins, recevait de son oncle, le « bon roi » René, l’Anjou (1475) et la promesse du reste de l’héritage, Maine et Provence, effectivement réunis au royaume en 1481. Louis XI eut, à partir de 1479, une série d’attaques. Il espérait avoir assuré sa succession, d’abord par la naissance, en 1470, d’un fils, Charles. D’autre part, il croyait avoir neutralisé deux grands seigneurs, Louis, duc d’Orléans, et Pierre de Bourbon, duc de Beaujeu, mariés d’autorité à ses deux filles. Mais, tandis que Louis, marié à Jeanne l’Estropiée, rongeait son frein (c’est le futur Louis XII), Pierre se préparait à exercer avec sa femme Anne la régence et le gouvernement pendant la minorité prévisible du dauphin Charles. Louis XI, qui avait toujours été un roi itinérant et qui, n’aimant pas plus Paris que son père, avait surtout résidé dans les villes et châteaux de la Loire, mourut à la fin d’août 1483 après avoir lutté contre la mort par tous les moyens que lui avait suggérés sa dévotion superstitieuse : appel à l’ermite calabrais François de Paule, prières spéciales à la Vierge de Cléry et à Notre-Dame d’Embrun, apport dans sa chambre, grâce à une autorisation spéciale du pape, d’une partie du contenu de la Sainte Ampoule du sacre conservée à Reims. Ses dernières volontés contredisent l’image d’un roi avant tout politique et moderne. « Il voulait être enterré à Notre-Dame de Cléry et non à Saint-Denis avec ses ancêtres. Il recommandait qu’on le représentât sur son tombeau, non vieux, mais dans sa force, avec son chien, son cor de chasse, en habit de chasseur » (Michelet). La renaissance du royaume après la guerre de Cent Ans Surtout absorbé par la diplomatie et la guerre, Louis XI perçut toutefois l’importance de la prospérité économique pour la puissance des États. Il incita, sans succès, les nobles à répudier le préjugé de dérogeance et à pratiquer industrie et surtout commerce. Il favorisa l’introduction de nouvelles activités économiques en France (la soie à Lyon et Tours) et le développement des foires (Lyon contre Genève). Il voulut mettre une monnaie assainie au service de l’économie française en créant en 1475, une monnaie forte : l’écu au soleil. Il chercha aussi à renforcer l’infrastructure de l’unité du royaume : essai d’uniformisation des coutumes (ordonnance de Moutils-lès-Tours, 1454), développement du système des postes datant d’un siècle. Il sut montrer beaucoup de souplesse dans la levée des impôts, l’attitude à l’égard des villes, le comportement vis-à-vis de l’Église : rompant avec la politique agressivement gallicane de son père, il conclut un concordat qui remplaça la Pragmatique Sanction, abolie en 1461, mais dont plusieurs articles furent conservés ou rétablis. Il sut aussi accepter que la « décentralisation géographique » vienne limiter la « centralisation institutionnelle » (B. Guenée). Surtout, sans que le roi, ses conseillers, ses officiers n’interviennent, s’amorce la remontée démographique, économique, artistique de la France. Vers 1475 s’achève « la première restauration rurale », celle qui a affecté « les anciens terroirs riches » (G. Fourquin). La spécialisation agricole fait des progrès (lin dans le Nord, chanvre dans l’Ouest, pastel en Languedoc). La draperie se répand dans les petites villes et les campagnes et une ordonnance royale la réglemente, en 1469, pour tout le royaume. De même, la France est gagnée par l’imprimerie (Paris, 1470 ; Lyon, 1473) et, si le gothique flamboyant demeure le style dominant, la Renaissance, à l’instar de l’Italie, s’instaure lentement (miniatures et peintures de Fouquet, sculptures de Michel Colombe). Cette France, gouvernée empiriquement par Louis XI, rate enfin pour toujours ses chances de devenir une monarchie constitutionnelle dans la ligne d’Étienne Marcel et de Caboche. Louis XI n’avait réuni – avec répugnance – les états généraux qu’une seule fois, en 1468. Au lendemain de sa mort, Pierre et Anne de Beaujeu, héritiers de sa pensée, firent définitivement échouer les états généraux de Tours (1484).

Bibliographie

  • NICOLAS, Alain : Les autographes. Ed. Maisonneuve et Larose, Paris, 1988.
  • CHAULEUR Andrée et DRUET Roger : De Dagobert à De Gaulle, écritures de la France. Paris, Ed. Dessain et Tolra, 1985.
  • BRACHET, André : Pathologie mentale des rois de France. Paris, Ed. Hachette, 1903.
  • DUPRE, M. : "La folie de Charles VI" in : Revue des sciences. 1911, T1 et T2.
  • LEMAIRE, J-C. : Le roi empoisonné 1380-1422 : la vérité sur la folie de Charles VI. Société de production littéraire, Paris, 1977.
  • AUTRAND, Françoise : Charles V. Paris, Ed. Fayard, 1994.
  • IPCAR, L : Louis XI et ses médecins. Thèse de doctorat, Faculté de médecine, Paris, 1936.
  • KENDALL, P.M. : Louis XI. Paris, Ed. Fayard, 1974.